L’homme en frac
Assis, chaque soir qui passe,
Dans votre imperméable songe,
Vous occupez à peu près la même place
Que l’eau contenue dans une éponge.
Seul à mes yeux, vous existez
Silhouette floue ou mensonge
Dieu, peut-être, certain, le sait :
Vous êtes le mal qui me ronge.
Vous restez là, immobile dans la nuit,
Sans expression, comme un pantin.
Vous l’homme en cape, sans un pli,
Je vous aime sans aucun dessein.
Fruit de mes illusions ou réalité,
Je reste là à vous contempler
Sans respirer, peur de vous emporter,
Le temps d’un chant et ses couplets.
Je vous en prie, ne partez pas !
Tant de mots se bousculent,
Que je veux hurler mais n’ose pas,
Peur de m’avouer que j’affabule.
Mes yeux, ne vous ouvrez plus ;
Emportez moi sur ce banc de bois.
Attendez, je ne le vois plus
L’homme en frac et écharpe de soie.
Il est fini mon rêve douillet :
Le jour se lève, le banc est vide.
Je vous espère plus que jamais
Ce soir sous le réverbère livide.
S’il me restait quelques secondes
Alors j’oserais peut-être dire
Que j’en aime un seul au monde :
L’homme en frac qui oublie de venir.
(Arwen Gernak) 03-01-05
Dim 9 Jan à 2:00
