A la Rose de mes pensées...
J'entrai dans ces régions âcres et dures
Où s'exercent sans pitié les rafales de grésil
Et dans un remous neigeux s'engendrent les tempêtes
Ma pauvre Rose aux pétales liserés de givre et d'argent...
Dans mes mains en calice rougies par le vent :
Ni sang répandu, ni cheuveux dorés... Un plume
Douce et dolente, détachée des ailes de mon Ange
Ma Rose pâle, chargée de souvenirs alanguis...
La glace dentelière grave sur mes membres immobiles
Les méandres incertains d'un Eden de givre
Et dans mon coeur transi éclôt sans bruit
Ma Rose pourpre au parfum de folles amours
Loin de corps meurtri, mes pensées s'envolent
Vers les rivages mélancoliques où, patientes,
Elles assemblent sans gémir les grains du sablier
Ma Rose des vents, chapelet de martyr et d'ennui...
Jamais la lune ne brille au firmament, ni les étoiles ne scintillent,
Sans m'apporter de rêves de vous, de rêves amoureux
Où les délices de douceur et les parfums d'oliban et de musc
Font une Rose que nous cueillerons ensemble.
Quand les souvenirs ensorcelants de nos caresses
Font paraître autour d'eux l'obscurité plus profonde encore,
Je souffle avec amour sur la plume consolante et étreint
Ma Rose blanche qui banni l'oubli et l'indifférence.
Mais l'Errance me retient loin de mon tendre amour
Et je m'endors sous un linceul glacé de neige
Espérant me réveiller dans tes bras soyeux et cueillir sur tes lèvres
Une Rose brûlante de tendresse et de passion.
La buée ne réchauffe plus mon souffle, mon coeur s'épuise,
Je quitte ces régions âcres et dures pour les rivages enchantés
Où tu m'appartiendras, où je t'appartiendrai...
Dans la lumière de tes yeux fleurira une fleur nocturne plus douce que le jour.